Le modèle de consommation actuel et l'appât du gain poussent les acteurs économiques et autres distributeurs, tous domaines confondus, à ne pas fixer le prix d'un produit en fonction de son coût de revient augmenté d'une marge 'raisonnable', mais plutôt à répondre à la question : jusqu'où le consommateur est-il prêt à aller ?
Tout le problème est là.
Dans le domaine de la création audio-visuelle artistique, un renversement de ce modèle aurait pour effet immédiat :
- de replacer le talent au centre du débat, au détriment des courants de mode imposés par un petit nombre de professionnels.
- de replacer l'industrie à la périphérie, voire l'éliminer de l'équation car obsolète aujourd'hui, Internet étant le meilleur vecteur de distribution.
- de placer l'utilisateur final au contact direct du créatif, toujours grâce au média Internet, car il est le mieux placé pour sanctionner la création et le talent, étant lui même l'objet du désir de l'artiste.
- de diviser par n , le prix 'utilisateur final' du produit, n étant très variable selon les degrés d'inconscience des vendeurs.
Bien sur cela ne se ferait pas sans grincements de dents et peut-être même sans menaces de licenciements massifs et nous touchons surement la vraie source de cette débauche législative.
D'où l'idée de faire un test :
choisir par exemple une date dans l'année qui serait
'le jour du CD audio à 7 Euros et du DVD à 10'
et ce serait bien payé...
un monde parfait
Au lieu de cela, ce qui se profile à l'horizon, que dis-je, derrière la porte, c'est la transformation d'Internet en un supermarché aux produits dûment stérilisés, avec ses promotions, ses têtes de gondole, ses cartes de fidélité. Le seul rôle de l'internaute sera de se balader dans les rayons, et de passer à la caisse.
Le talent ? troisième rayon à gauche.
L'information ? veuillez écouter les annonces diffusées par haut-parleurs et la musique d'ambiance.
les indices
On n'a jamais vu, depuis qu'Internet existe, une telle frénésie législative axée autour du contrôle et de la répression sur la Toile. Le caractère atypique de ce monde virtuel, est que très peu de gens a une vue d'ensemble, et certainement pas les pouvoirs publics ni certains de leurs juges, ce qui les conduit à rédiger des textes de lois incohérents, ou à appliquer de manière incohérente, et par analogie, des lois existantes. On lit ici ou là qu'une liste noire de sites est capable d'arrêter un réseau pédophile ou que la surveillance et les mesures de rétorsion vont être confiées à des sociétés de droit privé, à savoir les fournisseurs d'accès.
Juge et parti
La tentation de réguler la bande passante par cette répression graduée sera grande et trouve ici une excuse toute prête : tout le monde ou presque télécharge et partage.
Qui surveillera les fournisseurs d'accès on le sait, ce sera une Haute Autorité encore en devenir, mais la vraie question c'est comment ? Si un organisme 'indépendant' était capable d'effectuer cette tâche, pourquoi ne l'exercerait-elle pas directement auprès des internautes ?
Les moyens de répression
Je ne reviendrai pas sur les 10 raisons d'être contre la loi Hadopi (alias Olivennes, alias Création et Internet) énoncées par Numerama, mais juste sur la onzième, plus récente, et a elle seule largement suffisante. En effet, la base unique de la riposte graduée sera l'adresse IP du suspect. Or une étude américaine vient de prouver que cette adresse pouvait être usurpée facilement, et désigner un innocent... ou bien encore un routeur wifi. Combien de temps vont mettre ces solutions pour être partagées par tous ? Comment dès lors exercer la riposte, graduée ou non ?
Les vraies motivations
Ces paradoxes tendent à prouver s'il en était besoin que les motivations de cette accumulation de textes de loi sont ailleurs. Et selon moi elles sont très simples : les groupes d'influences qui gravitent autour des décideurs de notre pays font le forcing de la dernière chance. Je ne vois pas comment va survivre le modèle économique mis en place par les majors de l'audiovisuel. Car après tout, depuis l'invention du cinéma, ces intermédiaires ont construit des fortunes colossales sur les produits dérivés de la scène théâtrale, musicale ou autre. Il est temps pour eux de tourner la page et pour les plus 'créatifs' de construire un nouveau modèle basé sur le Web, c'est dans leur intérêt. Il semble que ceux-là soient encore rares. En attendant, comme les groupes pétroliers qui font monter le cours du pétrole, ou les groupes pharmaceutiques qui licencient à tour de bras : ils engraissent leurs actionnaires.
Conclusion
Quoi qu'il arrive, il est dans l'intérêt de l'internaute de se doter des moyens de surveiller sa propre activité sur le web, cela est dit dans l'Hadopi, mais était déjà vrai avant. Ces données lui fourniront des éléments de comparaison avec la surveillance que sera contraint d'exercer le FAI pour le compte de sa future autorité de tutelle. En attendant des jours meilleurs...
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